Un réseau engagé et militant pour l’Agriculture paysanne

L’Agriculture paysanne et la PAC

Pour se développer sur les territoires, l’Agriculture paysanne a besoin de politiques ambitieuses et protectrices, au niveau national et au niveau européen, à travers la PAC notamment. Pour chacun des six axes, la PAC peut-être un levier d’accompagnement et de progrès.

L’Agriculture paysanne est née de la réflexion des paysan·nes de la Confédération paysanne et la FADEAR. Elle propose des solutions afin que des paysan·nes nombreux·es vivent de leur travail et en conservent le sens : « Produire pour nourrir et non produire pour produire ».

Cette autre voie cherche à récréer des territoires vivants avec des fermes nombreuses et une activité agricole viable et désirable. Pour atteindre ces objectifs, l’Agriculture paysanne se base sur 6 piliers : le travail avec la nature, la qualité des produits, l’autonomie, la répartition, le développement local et la transmissibilité.

Cette vidéo présente l’Agriculture paysanne, à travers l’exemple de la Ferme de Segonds, en Aveyron, qui s’inscrit pleinement dans cette démarche autour des 6 thèmes.

Dans cet article, nous détaillons le lien entre les 6 axes de la démarche Agriculture paysanne et la Politique Agricole Commune.

Le travail avec la nature

L’Agriculture paysanne repose sur l’équilibre du vivant, la protection des ressources naturelles, la restauration et la valorisation de la biodiversité. Elle cherche aussi à s’adapter au dérèglement climatique et à atténuer ses effets en proposant des solutions. Les communs comme l’eau ou les sols sont limités et menacés. L’Agriculture paysanne vise à les économiser, les protéger et les partager.

Pour soutenir les fermes qui s’engagent de ces démarches, la PAC peut accompagner les transitions et rémunérer les services rendus : agriculture biologique, élevage à l’herbe et en plein air, pastoralisme, légumineuses, haies, diminution des pesticides, etc. Si les outils existent dans la PAC (éco-régimes, mesures agro-environnementales et climatiques, aides à la conversion bio, etc.), ils sont largement perfectibles et pourraient cibler encore davantage les systèmes qui s’inscrivent dans une démarche globale de transition.

Dans cette vidéo, Mathieu Razy nous explique comment il met cela en pratique à la ferme des Bourettes, dans le Rhône.

La qualité des produits

Cela signifie produire de façon transparente pour les consommateur·rices, respecter les cycles naturels et le bien-être animal ou encore choisir un label qui nous correspond.

La PAC peut soutenir la qualité des produits de différentes manières. En soutenant les systèmes d’élevages en plein-air ou l’élevage à l’herbe, les aides de la PAC peuvent contribuer activement à soutenir l’élevage paysan et donc le bien-être animal.

Concernant les labels, la PAC permet de soutenir l’agriculture biologique, particulièrement intéressante car sans pesticides, ni intrants de synthèse ni OGM. Le cadre européen permet de soutenir ce modèle. La France peut et doit destiner davantage de moyens à ce mode de production.

L’autonomie

En Agriculture paysanne, il est également primordial de pouvoir rester maitre des décisions à prendre sur sa ferme. Cela signifie limiter les achats en semences et en aliments pour animaux, préférer les produire soi-même et valoriser les ressources locales, limiter sa dépendance aux énergies fossiles et le suréquipement technologique et numérique, mais également maîtriser son endettement et sa dépendance aux aides.

La PAC soutient les investissements via des aides spécifiques. Il est possible d’orienter ces aides pour financer des investissements sobres et qui favorisent l’autonomie. Les aides peuvent également être allouées prioritairement aux systèmes qui favorisent les économies d’intrants et d’aliments (élevage à l’herbe ou production de fourrage, rotation des cultures pour limiter la consommation de pesticides et d’engrais de synthèse, etc.). Il est possible par exemple, pour les aides couplées animales, de rémunérer plus fortement les animaux qui seraient nourris à l’herbe, ce qui favorise l’autonomie.

La répartition

Un des axes clés de l’Agriculture paysanne repose sur le fait de pouvoir répartir équitablement les volumes et mes moyens de production, notamment du foncier et des autres ressources. Cela signifie pouvoir dégager un revenu suffisant sur une surface et des tailles d’ateliers raisonnables pour permettre à d’autres paysan·nes de travailler et améliorer sa marge nette par unité produite en limitant la capitalisation.

Cette juste répartition de la production doit garantir un accès à un travail et à un revenu décent et permettre l’accès au métier au plus grand nombre sur des fermes à taille humaine.

Sur ce point, un des leviers majeurs réside dans la répartition des aides de la PAC, qui passe par la dégressivité et le plafonnement des aides avec un ciblage à « l’agriculteur actif » plutôt que vers les surfaces. En attendant de pouvoir cibler les aides sur les actifs plutôt que les hectares, le paiement redistributif majorant les aides sur les premiers hectares de chaque ferme reste l’outil le plus pertinent pour assurer une meilleure répartition. Le paiement redistributif, aussi appelé aide redistributive, est une aide découplée d’un montant fixe au niveau national, payée sur les 52 premiers hectares admissibles des fermes éligibles (taille moyenne des exploitations en 2010). En concentrant les aides sur les premiers hectares, le paiement redistributif vise à soutenir les fermes à taille humaine et donc l’emploi.

Dans cette vidéo, Anne Déplaude, paysanne dans la Loire, nous explique comment ce principe de répartition se concrétise sur sa ferme.

Le développement local

L’Agriculture paysanne œuvre également à favoriser le développement local : entrer dans un réseau local de partage agricole, ouvrir sa ferme régulièrement au public, s’investir dans la vie citoyenne.

Sur ce plan, la PAC ne dispose pas de beaucoup de levier à l’échelle de la ferme. Certaines du second pilier de la PAC permettent néanmoins de financer des initiatives rurales agricoles ou non agricoles portées par des associations ou des collectifs qui visent à préserver la vitalité des territoires, via des actions de formation, de sensibilisation ou d’information.

La transmissibilité

Enfin, le dernier axe structurant de l’Agriculture paysanne réside dans la capacité à se donner les moyens de transmettre sa ferme aux nouvelles générations. Cela implique de limiter les agrandissements et les investissements qui seraient trop lourds pour que la ferme soit reprise, sécuriser son foncier, intégrer son temps de travail dans le calcul de son coût de production pour assurer la viabilité de la ferme et ne pas décourager des volontés d’installation. Cela nécessite également de rendre la ferme agréable à vivre et s’inscrire dans un réseau de solidarités.

Sur ce point, il faut favoriser les dispositifs d’aide de la PAC qui limitent les logiques d’agrandissement et de concentration, mais également renforcer l’accessibilité des aides à l’installation.

En 2015, une nouvelle mesure de la PAC a été créée pour soutenir l’installation des jeunes agriculteur·rices, dans le 1er pilier de la PAC, avec une majoration des aides à la surface d’environ 100 euros/ha sur les premiers 34 hectares de chaque ferme. À la demande de la Confédération paysanne, cette aide à l’hectare a été remplacée depuis 2023 par « l’aide complémentaire jeune agriculteur » (ACJA), d’un montant fixe quelle que soit la taille de la ferme. Cette aide forfaitaire destinée aux jeunes installé·es constitue un premier pas vers une PAC qui installe, plutôt qu’une PAC qui favorise l’agrandissement, et constitue un complémentaire intéressant à la Dotation Jeune Agriculteur (DJA), désormais ouverte aux personnes de plus de 40 ans dans certaines Régions.