ARDEAR CVL - Un réseau engagé et militant pour l'Agriculture paysanne

Paroles de paysannes : Bernadette

Témoignage de Bernadette Vallée, éleveuse dans le Loiret (45)

« Garçon manqué » : ma vie de petite fille a débuté sur ces paroles de ma grand-mère. Une fille qui grimpait dans les arbres et aimait tondre la pelouse avec son père, était forcément une ratée de quelque chose. La suite a confirmé ma tendance à évoluer hors des sentiers battus par une majorité de femmes. À l’école forestière pour mes études, sapeur pompier volontaire dans ma vingtaine, coureuse de montagnes dans ma trentaine, éducatrice sportive un peu originale dans ma quarantaine, ma cinquantaine débute avec une nouvelle aventure dans l’élevage de brebis solognotes - tout en poursuivant ma carrière de forestière.

Des métiers et des engagements bénévoles dominés par les hommes… j’ai donc pratiqué. Autant de sexisme que dans le monde de l’élevage... je n’avais jamais connu.
Même l’acronyme NIMA (non issu·e du monde agricole) sonne au féminin.
C’est certain, femme de 50 ans, un peu rurale (mais surtout chez les bourgeois)… ben… « el’ sait pas t’nir ses bêtes ». Certaines réactions restent choquantes : être ignorée lorsque l’on parle en réunion, prendre un vent au moment des serrages de main, entendre « et votre mari, il fait quoi comme métier pour vous aider ? ». D’autres clichés, moins violents, pèsent souvent dans les échanges : les éleveuses sont proches des bêtes, pratiquent les médecines alternatives, veillent à la préservation de la biodiversité alors les éleveurs calculent les rations, surveillent le chargement à l’hectare, visent des objectifs économiques et réforment les bêtes sans y mettre de sentiments.

Mais dans le fond, nous savons passer outre. Car en élevage, les moments de sérénité s’apprécient et les galères effacent vite les blessures d’amour-propre. Et puis nos animaux, ils s’en fichent de notre genre, du moment que nous les soignons correctement et avec suffisamment d’amour.
De plus, ces inélégances parfois un peu lourdes, renforcent la solidarité et la cohésion entre femmes. Les aides-bergères, les chantiers participatifs très loin de la parité, les conseils et les paroles et les marques de soutien… sont autant d’élans de générosité qui se conjuguent souvent au féminin.

Sans vraiment encore me revendiquer paysanne, après seulement cinq ans d’élevage, j’ai voulu m’investir modestement à l’Adear. Un peu pour rendre ce que l’asso m’a apporté, mais aussi pour trouver une ambiance sans jugement et où l’on sent que les liens se tissent aussi autour des différences de chacun·e.


Si vous souhaitez témoigner de votre expérience, vous pouvez écrire à l’adresse communication@ardearcentre.org

Pourquoi un appel à témoignages ?
 Pour faire suite au #8mars : journée internationale de lutte pour les droits des femmes
 Donner de la place et de la visibilité aux paysannes pendant tout le mois de mars (et après !)
 Mettre en récit la pluralité des parcours des femmes paysannes
 Proposer de nouveaux imaginaires et permettre aux femmes et minorités de genre qui souhaitent s’installer de s’identifier et s’inspirer !

Merci à nos financeurs :

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