ARDEAR CVL - Un réseau engagé et militant pour l'Agriculture paysanne

Paroles de paysannes : Marie-Agnès

TÉMOIGNAGE d’une paysanne retraitée

Mon père veuf à 43 ans, a élevé seul ses 5 enfants avec de l’entraide familiale et autres. Après mon BEPA, je travaillais dans les fermes aux alentours et j’aidais mon père et mon oncle. Ils n’étaient pas associés mais avaient du matériel en commun.
J’aidais pendant les grands chantiers : les semis, la moisson et la récolte des betteraves sucrières. Ça me plaisait. En parallèle, je faisais de la formation pour adulte : je me spécialisais en comptabilité, en gestion et en agronomie.

Un jour, mon oncle (50 ans), me propose de reprendre sa ferme. J’avais 23 ans. C’est un de mes frères qui m’a dit « vas-y ». On était en 1981, c’était une ferme de 26 ha. On m’a traitée de folle à l’époque.
Et j’ai osé faire le pas de m’installer parce que j’aimais ce métier. 9 ans après, la ferme est « à vendre et plus à vendre », et se termine par l’achat de 3.3 ha de foncier. Le syndicat de la Confédération Paysanne, où j’étais impliquée, m’a beaucoup appuyée pendant cette période. Je me suis agrandi avec la ferme de mon père de 30 ha en 1993 (à son départ à la retraite).

J’ai travaillé avec mon père, ce qui n’a pas toujours été simple. Il me disait de me marier avec un paysan, que ça marcherait mieux. On s’engueulait beaucoup mais on arrivait à fonctionner ensemble. Et puis, j’ai suivi la formation « communication non violente » pour mieux communiquer et travailler ensemble.

Aussi, il y avait des propos sexistes : par exemple le technicien s’adressait forcément à mon père. Au final c’est lui qui était embêté, il ne me vendait rien ! Le vendeur de matériel me demandait où était le patron, je lui répondais « ben je ne sais pas, je ne le vois pas le patron » et il s’en allait sans savoir que c’était moi la patronne !

Je me suis investie à la Conf’ paysanne départementale. Il y avait beaucoup d’actions foncières à l’époque. Les agrandissements profitaient toujours aux mêmes et des plans de développement mettaient des paysans en situation de faillite après une chute de prix !!!! Puis, je suis rentrée au comité national au congrès de Rodez 1993 puis en 1995 je suis rentrée au Secrétariat national, sur le volet formation entre autres. J’ai appris le syndicalisme, à me situer politiquement. J’y étais trois jours par semaine (mon père me remplaçait sur la ferme) ! Le syndicat te permet de rester debout, il ne faut pas rester seule, il faut construire ensemble. A l’époque, il n’y avait pas énormément de femmes, on était deux au secrétariat. Aujourd’hui, il y a beaucoup plus de femmes qui s’investissent et qui s’installent. C’est important de leur laisser la place et grâce au texte sur la parité au comité national ça se met en place.

C’est important de partager son histoire. Ça fait toujours plaisir de voir des femmes qui adhèrent à ce métier, qui veulent le faire d’une autre manière. Aujourd’hui, je suis présidente de la CIAP CVL (la Coopérative d’Installation en Agriculture Paysanne) et ça me donne la niaque ! »


Si vous souhaitez témoigner de votre expérience, vous pouvez écrire à l’adresse communication@ardearcentre.org

Pourquoi un appel à témoignages ?

 Pour faire suite au #8mars : journée internationale de lutte pour les droits des femmes
 Donner de la place et de la visibilité aux paysannes pendant tout le mois de mars (et après !)
 Mettre en récit la pluralité des parcours des femmes paysannes
 Proposer de nouveaux imaginaires et permettre aux femmes et minorités de genre qui souhaitent s’installer de s’identifier et s’inspirer !

Merci à nos financeurs :

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